Commission parlementaire sur les universités - L'Université Laval veut
redistribuer les cartes
Les institutions de haut savoir s'investissent trop dans le
recrutement et négligent ainsi parfois la recherche de la qualité,
laisse entendre Michel Pigeon
Marie-Andrée Chouinard
Édition du mercredi 25 février 2004
Mots clés : Québec (province), Université, Gouvernement, commission
parlementaire
Indexer les droits de scolarité, revoir la carte universitaire, éviter
une formule de financement centrée sur le per capita et récompenser
les collaborations inter-établissements à coups de dollars
additionnels: l'Université Laval a joué d'audace hier, devant la
commission parlementaire sur les universités, en proposant au
gouvernement de rejouer les dés.
Version pour imprimer
Faire suivre ...
Réactions
Droit de reproduction
Textes associés
Université Laval - Grève générale des chargés de cours
(24.02.2004)
Financement des universités - Pas facile de mettre un prix sur la
tête des étudiants
(24.02.2004)
Le ministre Pierre Reid est à l'écoute - Le coût du savoir
(21.02.2004)
Les enseignants ne veulent pas d'un ordre professionnel
(20.02.2004)
Commission parlementaire sur les universités - Les défis posés à
Pierre Reid
(17.02.2004)
Dossier(s)
Éducation
Aux côtés de ces remises en question, les témoignages se sont
multipliés hier en faveur du maintien du gel des droits de scolarité.
Porteuse de ce dossier, la Fédération étudiante universitaire du
Québec (FEUQ) a rappelé au gouvernement que la moindre hausse des
droits de scolarité nuirait à l'accessibilité des moins nantis aux
études supérieures.
Le recteur de l'Université Laval, Michel Pigeon, a entamé hier la
deuxième journée d'audiences de la commission parlementaire sur les
universités, en insistant sur les «effets malsains» de la course au
recrutement, particulièrement au premier cycle. La formule de
financement, basée sur le per capita, incite les universités en mal
d'argent à se battre pour les «clientèles», ce qui les fait glisser
vers des «comportements qui ne sont pas de type universitaire».
«Si notre bureau de recrutement n'est pas extrêmement efficace, on
risque un déficit encore l'an prochain», a fait valoir le recteur aux
députés de la commission de l'éducation. «Le gouvernement nous enferme
dans une logique de croissance d'effectifs à tout prix, qui n'améliore
pas nécessairement la qualité», ajoute-t-il.
Un campus de l'Université du Québec à Rimouski situé à Lévis, «à
quelques kilomètres à vol d'oiseau de l'Université Laval», et qui
offre les mêmes programmes est-il bien utile ? demande Michel Pigeon,
qui a vu dans cette commission une occasion de «lancer le débat» sur
une nouvelle carte universitaire.
L'université, qui estime que sa part des 375 millions réclamés par les
universités se chiffre à 61 millions, propose que la formule de
financement ne soit plus uniquement basée sur le per capita et qu'elle
récompense, par exemple, l'offre de programmes conjointe, tel que le
fait le réseau public de l'Université du Québec.
«Ne serait-il pas logique de chercher un système qui ferait en sorte
que toutes les universités québécoises collaborent plus facilement, et
non pas seulement une partie d'entre elles ?», lance le mémoire, qui
remet en question l'existence d'un réseau d'universités à charte
privée cohabitant avec les Universités du Québec, et suggère aussi un
meilleur arrimage et une plus grande collaboration entre le collégial
préuniversitaire et l'université.
Sur le sujet «tabou» des droits de scolarité, Michel Pigeon croit
que «tout ce qui gèle dégèle, et plus c'est gelé longtemps, plus ça
fait mal quand ça dégèle», a-t-il indiqué aux députés de la commission
de l'éducation, précisant la préférence de son université pour une
indexation des droits de scolarité, ce que la Confédération des
associations étudiantes de l'Université Laval (CADEUL) a immédiatement
dénoncé. L'association s'oppose au fait que le recteur présente ce
mémoire au «nom de la communauté universitaire», car elle affirme que
les représentants étudiants présents au Conseil universitaire n'ont
pas donné leur aval à un scénario d'indexation des droits de
scolarité.
Cette proposition ne sourit pas non plus à la Fédération étudiante
universitaire du Québec (FEUQ), qui a présenté hier à Québec un
mémoire truffé d'une trentaine de demandes visant à améliorer le
financement et la qualité des universités. Opposée à toute hausse des
droits de scolarité, la FEUQ a soumis un plan de financement qui met
en avant la création d'un fonds pour le savoir universitaire, financé
par une taxe sur les bénéfices avant impôt des entreprises pour les
quatre prochaines années.
«L'habitude est déjà créée avec le Fonds jeunesse, qui cesse ses
activités cette année», explique Nicolas Brisson, président de la FEUQ
pour encore deux mois. «Nous proposons d'amasser 114 millions avec la
continuité de ce fonds.»
Pour aller chercher les 261 millions additionnels -- liés à la demande
des universités de récupérer 375 millions de plus --, la FEUQ affirme
qu'elle veillera au grain et que le prochain budget serait bien «mal
venu» d'afficher la baisse d'impôt promise. Le transfert fédéral de
quatre milliards aux provinces par point d'impôt s'ajoute aux
scénarios de financement proposés par la fédération étudiante.
Militant pour la gratuité scolaire, ce pour quoi elle a manifesté la
semaine dernière à Québec, l'Association pour une solidarité syndicale
étudiante (ASSE) a immédiatement dénoncé les positions de la FEUQ, car
elle considère le maintien du gel «complaisant» et refuse de s'en
contenter.