Québec pige 100 millions dans les poches des étudiants
Marie-Andrée Chouinard
Édition du samedi 1er et du dimanche 2 mai 2004
Mots clés : Québec (province), Éducation, pierre reid, endettement, bourses
C'est 100 millions de dollars que le ministre de l'Éducation, Pierre Reid, ira
chercher dans les poches des étudiants dès septembre en avalisant une augmentation de
l'endettement, détaillée hier à l'Assemblée nationale. Les étudiants ont rugi
devant la hausse des plafonds des prêts de 72 % à l'université, accusant le ministre
de présenter des scénarios plus dévastateurs que ceux appréhendés.
Pierre Reid
Le Devoir
Des chiffres ? Une hausse de 72 % des plafonds des prêts au 1er cycle universitaire; 52 %
à la maîtrise et au doctorat; une augmentation de 49 % pour les étudiants du collégial
technique et de 41 % pour ceux du secondaire professionnel. Ces augmentations seront en
vigueur le 1er septembre prochain.
Et encore des chiffres : le prêt maximal passera de 2310 $ à 3250 $ au secondaire, pour
une hausse de 940 $. Au technique, il bondit de 2120 $ à 3150 $ (1030 $ de plus) et au
premier cycle universitaire, de 2680 $ à 4630 $ (1950 $). À la maîtrise, le montant des
prêts maximal, au-delà duquel une bourse est possible, vogue de 3720 $ à 5670 $ (1950 $).
Au doctorat enfin, il grimpe de 3740 $ à 5690 $ (1950 $).
Plutôt que de soutirer 63 millions des poches des étudiants, le ministère de
l'Éducation (MEQ) va chercher plus de 100 millions avec ces remodulations de plafonds
des prêts, pour une hausse de 59 % par rapport au moment annoncé. Une «contrepartie» qui
lui permet «d'assurer la qualité du réseau universitaire et d'embaucher de
nouveaux professeurs», comme l'a indiqué au Devoir hier le ministre de
l'Éducation, Pierre Reid.
«La hausse des plafonds des prêts donne une plus grande marge de manoeuvre [que les 63
millions annoncés], parce que les besoins en volume d'aide ont augmenté», a-t-il
expliqué hier, peu après un avant-midi d'étude des crédits où l'opposition l'a
talonné sur le détail de ces mesures d'aide financière. «Ça donne au total un peu plus
de 100 millions de dollars.»
Cette confirmation de l'endettement des étudiants, plus importante que les pires
scénarios escomptés notamment par la Fédération étudiante universitaire du Québec (FEUQ),
«nous a permis, par la force des choses, de ne pas faire une ponction de la même hauteur
dans les universités», a aussi précisé Pierre Reid, qui affirme ne pas comprendre la
colère des étudiants.
«Je ne me l'expliquais pas avant [aujourd'hui], je ne me l'explique pas plus
maintenant. C'est d'abord en pensant à eux que nous avons fait cela. Nous voulons
que tous les étudiants aient accès à l'aide financière.»
Le principe de hausse des plafonds des prêts augmentera l'endettement étudiant moyen
de 1170 $ à la fin des études secondaires professionnelles, calcule le MEQ, de 2170 $ au
terme des études collégiales techniques et de 5840 $ après un premier cycle universitaire.
«Ça ne change rien ! Ça ne changera que lorsque viendra le temps de rencontrer les
obligations des institutions financières ! Les effets se feront sentir seulement une fois
les études terminées», a expliqué hier à l'Assemblée nationale le ministre Reid, lors
de l'étude des crédits alloués à l'éducation.
Ces propos hérissent le nouveau président de la FEUQ, Pier-André Bouchard, qui accuse
Pierre Reid de «gérer à l'aveuglette», de ne pas se «préoccuper de la génération
montante» et d'être incapable d'expliquer la manière de gérer le système de
remboursement proportionnel au revenu (RPR), promis pour atténuer la hausse de
l'endettement.
Au ministre qui affirme que l'impact sur l'accessibilité aux études sera nul, M.
Bouchard réplique «qu'il y aura certainement une incidence sur la perception des
études supérieures chez les étudiants les plus démunis. Si on veut assurer la relève, ce
n'est pas en endettant les étudiants qu'on s'en donne les moyens».
La députée péquiste Pauline Marois, critique en matière d'éducation, n'a pas non
plus tellement apprécié ces mesures dévoilées hier dans le cadre de la commission de
l'éducation. «Le ministre a répété à nouveau qu'il avait toutes les études et les
simulations, a-t-elle dit. Si elles sont disponibles, il doit les déposer. Il les a ou il
ne les a pas ?»
Bombardant le ministre de questions sur les modalités de RPR, que le ministre associe à
une «police d'assurance», la députée de Taillon n'a eu aucune réponse. «Ce sont
des questions auxquelles il serait irresponsable d'apporter aujourd'hui des
réponses improvisées», a laissé tomber le ministre Reid.
Usant souvent devant la Commission de l'éducation de comparaisons avec l'Ontario,
où l'endettement des étudiants est encore plus marqué, le ministre Reid a précisé par
la suite que «ce sont les étudiants du Québec, et de très très très loin, qui sont les
mieux traités au Canada» en matière d'aide financière. «Nous avons tenté de faire une
équation qui n'a pas d'impact sur l'accessibilité aux études.»
Au lendemain du budget, le ministre Reid avait précisé les mesures destinées à
l'éducation, confirmant au passage une ponction de 63 millions dans le budget de
l'aide financière, qui en compte 211. La FEUQ avait alors réagi en analysant ces
données -- on ne connaissait pas la hauteur des nouveaux plafonds des prêts -- et avait
estimé à 50 % la hausse de l'endettement étudiant.
«C'est plus que ça, et c'est doublement scandaleux», déplore Pier-André Bouchard,
de la FEUQ, qui estime que «le gouvernement casse les jambes de la jeunesse sans savoir
quand ni comment il pourra offrir une béquille».
À bas l'empire monopolistique du mal!!!
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