Camarades, le conseil exécutif voudrait saisir cette opportunité pour émettre quelques réflexions sur nos stratégies d’action et les tensions existantes au sein de l’ASSÉ depuis un certain temps.


De notre côté, nous sommes satisfait-e-s de la participation à la manifestation. Nous comprenons que certaines personnes ont pu être déçues de constater que nous étions moins nombreux et nombreuses que le 2 avril dernier. Toutefois, comme cela a été soulevé à plusieurs reprises aux congrès cet automne, plusieurs associations étudiantes ayant mené une grève au printemps passé ressentent présentement un essoufflement. Malgré les difficultés qu’ont rencontré certaines associations étudiantes dans leur mobilisation locale, soit en raison de l’épuisement de leur base militante ou des échecs vécus au printemps dernier, nous étions tout de même 56 850 étudiants et étudiantes en grève pour le 5 novembre. Tout cela a demandé un travail important dans des délais serrés aux militants et militantes sur les campus locaux, travail sans lequel cette journée n’aurait pas pu atteindre les objectifs escomptés, soit de rappeler que la lutte à l’austérité est indissociable de celle pour le renouvellement des conventions collectives des syndiqué-e-s du secteur public. En ce sens, nous devrions être fiers et fières de ce que nous avons pu accomplir en si peu de temps.


Dans un second ordre d’idées, nous aimerions profiter de cette tribune pour démystifier certaines pratiques de l’ASSÉ lors des manifestations nationales. Nous avons entendus certain-ne-s manifestant-e-s dire que l’itinéraire de la manifestation avait été donné au service de police, car nous étions moins réprimé-e-s qu’à l’habitude. Or, nous pouvons vous assurer que les itinéraires ne sont JAMAIS donnés au service de police. Cela serait en effet en contradiction avec nos mandats et nos principes. Nous ne sommes jamais à l’abri de la répression policière, mais plus la foule est nombreuse et compacte, moins nous sommes vulnérables. A contrario de la manifestation du 5 novembre, la manif-action du 7 octobre a été plus que réprimée comme le montre ce vidéo: https://www.facebook.com/madocstudio/videos/vb.294417813921819/1024273660936227/?type=2&theater.


Lorsque nous organisons des actions et des manifestations, nous tentons d’assurer du mieux que nous pouvons la sécurité des participants et des participantes. C’est pour cette raison que nous avons une équipe de sécurité. Les personnes sur l’équipe de sécurité sont là pour administrer les premiers soins aux manifestants et manifestantes blessé-e-s, bloquer les automobilistes impatient-e-s, informer la tête de la manifestation des déplacements policiers et tenter de limiter les interventions policières en gardant la foule compacte. Moins la foule est compacte, plus nous sommes à risques que les forces policières encerclent une partie de la manifestation ou fassent des interventions ciblées. C’est l’une des raisons pour laquelle nous demandons souvent aux gens qui tiennent la bannière à la tête de la manifestation de ralentir, car selon les informations que nous recevons sur l’état de la foule, nous devons ralentir ou même nous arrêter pour s’assurer que tous et toutes soient en sécurité. Il faut aussi prendre conscience que nous ne marchons pas toutes et tous au même rythme. Les manifestations nationales rejoignent des personnes d’âge divers, des familles, et des personnes avec des handicaps. Il est donc normal que nous y marchions plus lentement qu’à une manif-action par exemple. En diversifiant les types d’action de perturbation et de mobilisation, nous allons rejoindre différentes personnes et leur donnons la possibilité de participer à la lutte contre l’austérité selon leurs moyens. C’est ce que nous appelons la diversité des tactiques. Il s’agit de l’un des principes de base de l’ASSÉ.


Nous avons aussi eu plusieurs commentaires sur le camion de son, comme quoi cela serait significatif d’une tendance corporatiste qui se serait instaurée à l’ASSÉ. Nous comprenons mal cette critique. Au contraire, le but de notre campagne actuelle est justement de mettre de l’avant des revendications fiscales, afin que le gouvernement réinvestisse massivement dans les services publics ET dans les conditions de travail des syndiqué-e-s de la fonction public ET dans le financement aux groupes communautaires. Notre objectif est de rassembler les différents groupes luttant contre l’austérité autour de ces revendications, afin de briser avec la tendance corporatiste du milieu syndical et même du milieu communautaire à certains égards. Notre discours est donc loin d’être corporatiste, et le fait qu’il y ait un camion de son pour faire des discours et mettre de la musique à certains moments de la manifestation ne représente pas une «tendance corporatiste» en soi. Si certain-e-s sont convaincu-e-s du contraire, nous vous invitons à nous partager vos réflexions, afin que l’on comprenne mieux les critiques.


De plus, nous avons déjà observé par le passé que le fait d’avoir un camion de son à l’avant de la manifestation diminuait les risques d’interventions policières et libérait plus facilement la rue. Finalement, pour ce qui est de la musique pendant la manifestation, nous essayons de faire plaisir à tous et à toutes. Vous êtes nombreux et nombreuses à venir nous dire de mettre de la musique lorsqu’il n’y en a pas ou à l’arrêter lorsqu’il y en a. Nous comprenons toutefois mal les reproches quant à la musique durant la manifestation du 5, puisqu’il y a à peu près 3 chansons qui ont jouées de tout le trajet.


Finalement, nous aimerions revenir sur le déroulement de la manifestation en tant que tel, car nous avons senti de nombreuses tensions monter, notamment peut-être en raison d’une incompréhension des pratiques expliquées ci-haut. Nous ne comprenons pas pourquoi des étudiants et étudiantes ont voulu détourner la manifestation à la hauteur de Ste-Catherine/St-Denis. Comme nous n’étions pas beaucoup, ce détournement a divisé la foule et a semé beaucoup de confusion, ce qui a laissé aux forces policières l’opportunité d’encercler une partie des manifestants et manifestantes qui étaient rendu-e-s sur Ste-Catherine. Heureusement, ces manifestants et manifestantes ont pu retourner sur St-Denis et poursuivre le trajet initial, mais bon nombre de participant-e-s non-étudiant-e-s ont à ce moment quitté la manifestation.


En effet, de nombreuses tensions ont surgi, qui ont malheureusement assombri l’ambiance générale de la manifestation. Les nombreuses tentatives de détournement ont en fait créé beaucoup de confusion et un sentiment d’insécurité pour plusieurs personnes en raison de la présence policière accrue dans la foule, rendue possible par la diminution de sa taille et de sa densité. Nous nous expliquons mal cette volonté de détourner la manifestation, alors que l’itinéraire n’avait pas été divulguée à la police. Interrogé-e-s à ce sujet par des membres de l’équipe de sécurité, certain-e-s manifestant-e-s nous ont répondu qu’ils et elles voulaient faire «leur trajet», bien qu’ils et elles aient reconnu par la suite qu’aucun trajet spécifique n’avait été réfléchi. Nous souhaitons en ce sens vous rappeler que toute action, manifestation, etc. doit être préparée à l’avance, sans quoi vous mettez en danger vos camarades.


Non toutes les rues ne sont pas sécuritaires! Lorsque nous concevons un itinéraire pour une manifestation, nous devons nous assurer que les rues que nous empruntons soient praticables et qu’elles comportent des issues. Il serait par exemple malheureux qu’une manifestation spontanée s’engage dans un cul-de-sac ou dans une artère bloquée par des travaux de construction ou qu’il y ait des obstacles sur le trajet que ne pourraient franchir certaines personnes. C’est pour cette raison que nous avons maintenu le trajet initial, malgré la volonté de certain-e-s manifestant-e-s d’emprunter un trajet différent. Il arrive également que certaines actions soient prévues lors de manifestations nationales. Détourner la manifestation spontanément peut mettre en péril ces actions et la sécurité des gens qui y participent.


Finalement, nous avons été la cible de certaines allégations comme quoi nous aurions nuit à une dé-arrestation. Il y a en effet eu une arrestation lorsque la manifestation était sur la rue Rachel et nous sommes resté-e-s à cet endroit un bon moment afin de mieux comprendre la situation et de mettre de la pression sur les forces policières. Toutefois, après un certain temps, force fut de constater qu’aucune dé-arrestation n’était possible et même que la situation empirait, alors que des lignes d’anti-émeute se formaient à différentes hauteurs dans la manifestation. À ce moment-là, nous avons donc décidé de remettre en mouvement la manifestation, afin d’éviter que d’autres personnes ne soient victimes d’arrestation ciblée. Le comité légal de l’ASSÉ a toutefois fait le suivi avec l’individu arrêté, qui a par la suite été relâché avec un ticket d’infraction municipal.


En espérant que ces informations puissent stimuler vos réflexions et participer à un dialogue au sein de l’ASSÉ, nous vous remercions d’avoir participé à cette journée de grève et au plaisir de se voir prochainement...sur un campus ou dans la rue!


Solidairement,

Le conseil exécutif

Association pour une Solidarité Syndicale Étudiante (ASSÉ)
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Bureau: (514)-390-0110