ASSÉ vs CLASSE : un mouvement enraciné ou opportuniste ?

 

Aujourd’hui, j’ai été choqué. J’ai été choqué de voir dans le cahier de congrès plusieurs avis de motion déposés par le Conseil exécutif pour changer le nom de l’Association pour une Solidarité Syndicale Étudiante (ASSÉ) pour que ce dernier s’arrime avec le nom de la désormais célèbre Coalition large de l’Association pour une Solidarité Syndicale Étudiante (CLASSE). Quand j’ai vu le débat surgir sur les réseaux sociaux, j’ai d’abord pensé qu’il s’agissait d’une blague. Suite à des vérifications, il apparaît que cette bonne blague soit réelle …

 

Un malaise plus profond

 

Il n’est pas nouveau dans mon parcours militant au sein de l’ASSÉ que certains militants et certaines militantes souhaitaient refaire l’image de l’ASSÉ. Au début, c’était le discours de l’ASSÉ qui choquait. Il y avait trop de référence à l’anticapitaliste. L’ASSÉ s’alliait toujours avec des groupes plus radicaux et pas avec les centrales syndicales et une certaines franges moins combative du communautaire. On préférait à ce moment ne pas se joindre à la « Coalition pour un Québec sans pauvreté » car leur revendication était trop minimaliste. Alors nous avons créé avec des groupes communautaires plus combatif une coalition pour mettre de l’avant un discours plus radical entourant le phénomène de pauvreté.  Je me souviens encore des manifestations du 1er mai, quand l’ASSÉ organisait avec plusieurs groupes plus marginaux le contingent « précaire en colère ». Un contingent qui visait à mettre le syndicalisme de combat à la marche des syndicats. Maintenant, au lieu de faire le débat sur quel genre de 1er mai on veut, on participe « aux événement du premier mai », histoire de ne déplaire à personne. Les résultats étaient peut-être mitigés, mais on le fessait car on croyait au discours qu’on mettait de l’avant. On n’essayait pas d’adapter  notre discours, on essayait de convaincre les gens que notre discours était juste.

 

Ensuite, on a critiqué notre esthétisme qui était supposément dépassé. Il fallait refaire le site web et changer notre graphisme en générale. Maintenant, on se contente plus de track fait un peu rapidement car on en a de besoin là. Maintenant, il faut plaire, il faut taper l’œil.  Et ici, je ne veux pas aborder la question de notre perception des médias de masse et du comment il faut collaborer/s’en servir. Je ne veux pas dire ici que je suis contre le fait que l’ASSÉ s’allie parfois avec des groupes moins radicaux pour mener à terme des campagnes politiques. La Coalition opposée à la tarification et la privatisation des services publics est un bon exemple que l’on peut mener des campagnes pertinentes autant dans le discours que dans les actions avec des groupes qui n’ont pas les mêmes modes d’action que nous. Je ne veux pas dire non plus que l’ASSÉ n’aurait pas due élever ces standards en graphisme. Le matériel d’information produit durant la grève était impeccable alliant à la fois le discours et l’esthétisme. Je ne veux pas dire que le travail fait sur les réseaux sociaux a perverti l’ASSÉ à l’instantanéité. Au contraire, je trouve que l’ASSÉ s’est bien adapté et même démarquer dans ce domaine.

 

Je ne veux surtout pas accuser le Conseil exécutif d’être de mauvaise foi et de s’attarder à des débats futiles et c’est bien important que cette courte réflexion soit interprétée ainsi. Je considère au contraire que l’exécutif actuel fait un bon travail, que leur proposition de plan d’action est à quelques petits points excellents. Je veux simplement signifier que à mon avis cette proposition n’a pas sa place dans le cahier de congrès. Qu’à la limite, s’il y a une volonté réel pour changer le nom de l’organisation, que ce débat ait lieu lors du prochain congrès d’orientation prévu au printemps 2013. Encore là, je ne serais pas à l’aise à renier notre histoire. Comme Gabriel Nadeau-Dubois a conseillé à Léo Bureau-Blouin sur twitter suite à son élection : « Seul conseil: n'oublie pas d'où tu viens ». J’ose espérer que ce conseil s’applique aussi à nous : N’oublions pas d’où on vient !

 

En fait, tout a changé à l’ASSÉ depuis que je m’y implique (2005), sauf les principes de base, le nom et le logo. Encore là, le logo à souvent fait partie de discussion sans devenir un réel projet sur la table. Mais là, je dois avouer que le changement de nom dépasse les bornes. En plus, ce n’est pas comme si le changement de nom venait d’un changement de nature de l’organisation. Le changement de nom n’a comme seul objectif de se coller au nom de la coalition de grève (CLASSE) pour profiter de sa popularité et du fait qu’il est connu du grand public. Donc un peu comme Garou ou Cœur de pirate, une organisation dite combative et démocratique, minimalement critique du capitalisme propose de changer de nom, car la CLASSE serait plus connu et populaire. Voici les propositions actuellement sur la table :

 

1. Confédération de lutte des associations pour une solidarité syndicale étudiante (CLASSE).

2. Coalition de lutte des associations pour une solidarité syndicale étudiante (CLASSE).

3. Centrale de lutte des associations pour une solidarité syndicale étudiante (CLASSE).

4. Convergence des luttes des associations pour une solidarité syndicale étudiante (CLASSE).

 

 

J’ose espérer que notre mouvement et les principes que l’on met de l’avant sont plus enracinés que le nom de l’organisation qui la défend.

 

Alex Desrochers, militant de l’organisation depuis 2005


--
Alex Desrochers