Bonjour communauté d'assé-support!

Ce dimanche 6 avril à 15h30 au CEDA dans le café mosaïque (2515 rue Delisle, proche du métro Lionel-Groulx) aura lieu un forum public sur un processus de Justice Transformatrice en cours.

Événement facebook: https://www.facebook.com/events/290217094469869/?fref=ts

Description de l'événement: 
''Depuis la foulée des dénonciations d'agressions sexuelles de novembre 2013, il y a plusieurs processus de justice transformatrice qui ont été mis en place par des survivantes. 

Le comité d'un de ces processus voulait faire un forum public pour démocratiser le processus, inviter les personnes à y participer, pour mettre à jour les personnes intéressées par le processus et pour clarifier certaines de ses incompréhensions. Ce moment permettra aussi de répondre à certaines critiques faites sur les dénonciations et sur la justice transformatrice.''

Ci-dessous une lettre publique expliquant le processus:

Tentative d'une justice transformatrice

2 avril 2014, à 16:31
Nous tenons à spécifier que le comité de justice transformatrice est composé d’environ 6 femmes

féministes. Il a été créer suite à une des dénonciations publiques dans les derniers mois, et certaines de ses membres sont aussi activent concernant d’autres processus. Ce texte est une description et une mise à jour des démarches entreprises dans le cas d'une dénonciation faite en novembre. Son nom ne sera pas divulgué ici, suite à sa demande , il a cependant accepté que nous donnions son nom aux gens qui écrirait au comité de justice transformatrice. À certains moments nous ferons référence à lui en le nommant « X ». Les propos écris au «je» sont ceux de la survivante. Le «nous» réfère aux membres du comité.


Nous tenons en compte les statistiques gouvernementales selon lesquelles 98% des agresseurs sont des hommes cisgenres1 et 80% des victimes d’agressions sexuelles sont des femmes.2 Nous avons tout de même tenté dans nos formulations de ne pas exclure les enfants de tout sexe, les personnes LGBTQI3, etc. qui sont aussi fréquemment victimes de différentes formes de violence sexuelle. Tenant compte des statistiques mentionnées et du fait que les dénonciations publiques ont été faites majoritairement par des femmes, nous utilisons ici le terme femmes pour mettre l’accent sur la violence sexuée particulière que vivent les femmes.


Dans une perspective féministe, nous avons adopté la définition suivante du consentement et des
agressions sexuelles. Le consentement en matière de sexualité doit être donné librement, en
connaissance de cause et de façon continue. Une agression sexuelle constitue tout acte sexuel commis sans le consentement d’au moins une personne impliquée dans l’acte sexuel.


Ainsi, dans le cas qui nous concerne, l’acte qui a été posé est défini comme agression sexuelle puisque le consentement de la survivante n’a pas été respecté. Toutes les agressions sexuelles ne sont pas vécues de la même manière, donc il nous semble impossible de les hiérarchiser selon l’acte qui a été commis. Nous considérons que seule la survivante peut le faire pour elle-même. Une agression similaire faite à deux femmes différentes peut avoir des séquelles différentes et des prises d’actions différentes selon la personne, le contexte, etc. Nous pensons qu’il n’est pas possible d’utiliser la dénonciation, ou l’absence de dénonciation, pour mesurer la gravité d’une agression. Seule celle qui l’a vécu peut savoir l’impact que le geste a eu sa vie.Le non-respect ou le bris du consentement reste le fait objectif qui sert à constater une agression.


Nous avons envie de questionner les intérêts qui peuvent amener certaines personnes à hiérarchiser ou non les agressions sexuelles dans une perspective de lutte contre la culture du viol. Pourquoi vouloir dire qu’une agression est pire qu’une autre? Ou qu’un tel bris de consentement était moins pire qu’un autre? Cela a pour impact de minimiser la gravité d’un acte violent de domination et d’appropriation. Chaque fois que le consentement n’est pas respecté, il s’agit d’une agression et c’est à chaque fois inacceptable! Peu importe la nature des agressions, elles peuvent toutes être dénoncées.


La dénonciation est un outil pour prendre acte et agir sur les inégalités et les rapports de domination. C’est une prise de parole et nous avons décidé de l’utiliser comme un pas vers la transformation de nos milieux et de la société. Il ne s’agit pas ici de se questionner sur les impacts que peuvent avoir les dénonciations sur la vie des agresseurs, et donc de se questionner à savoir si le geste était assez grave pour être dénoncé ou non. En tant que militantEs qui cherchent à élaborer un monde sans oppression, nous devons le créer ici et maintenant, autour de nous.


Le privé reste politique qu’il soit dénoncé ou non!


Retour sur le processus de dénonciation :


Au cours de l’été de 2013, X a été confronté au sujet de l’agression qu’il a commise, par une de ses
bonnes amies féministes qui avaient été contactées par la survivante. À ce moment, il a reconnu son agression, s’est engagé à y réfléchir et à contacter la survivante à ce sujet par la suite. Aucun suivi n’a été fait avec la survivante dans les mois suivants, alors que la survivante continuait et continue à vivre des répercussions de l’agression sur sa vie. Il n’était, et n’est, pas possible d’aboutir à un processus de guérison dans ce contexte. Dans le processus qui nous concerne, le comité considère qu’il était important qu’il y ait un suivi pour s’assurer d’une redevabilité quelconque. La survivante a décidé de rendre publics des actes commis dans le privé en novembre, sur Facebook. La dénonciation politise les actes d’agression.


Nous tenterons, dans les paragraphes qui suivent de répondre à la contestation et la remise en question de l’utilisation de Facebook comme médium de dénonciation. Selon nous, l’utilisation du mur de l’ASSÉ4 comme voie de dénonciation d’une agression sexuelle a repoussé la limite d’où et comment les personnes agressées sont légitimes de dénoncer ce qu’elles subissent. Les militants dénoncés sur le mur de l’ASSÉ étaient actifs et connus au sein de l’association et dans le milieu militant montréalais. De plus, cette organisation militante se veut féministe, dans ses pratiques et dans ses principes.


Quand la “limite”5 sociale qui encadre ce qui nous semble possible en matière de dénonciation des agressions s’est trouvée repoussée, les espaces considérés comme moins publics, moins chargés
politiquement, et moins dangereux que le mur de l’ASSÉ ont été utilisés par des survivantes pour prendre la parole sur des violences vécues. Nous faisons une corrélation entre la grande médiatisation des dénonciations et les nombreuses autres dénonciations qui ont été faites dans le privé par la suite permettant ainsi à plusieurs femmes de sortir du silence.


Moi-même, je me suis rendue compte qu’après la première publication sur le mur de l’ASSÉ, j’ai pu parler de ce qui m’est arrivé plus ouvertement que je n’aurais osé le faire avant la sortie publique
des premières dénonciations (celles de Frank et de JS Crépeau).


Le comité ne passe pas de jugement moral, il est en lutte. Nous souhaitions que les dénonciations et les processus se multiplient, afin qu’il ne soit plus possible d’ignorer les nombreuses violences sexuelles. Nous souhaitions nous organiser politiquement et solidairement pour que les violences sexuelles cessent au travers d'une lutte contre la culture du viol et du silence, bien qu’au moment de la dénonciation, les moyens pour y arriver n’étaient pas encore tout à fait clairs, pour nous. Ce n’est que dans les semaines qui ont suivi que nous nous sommes introduites au concept de justice transformatrice, et que nous nous sommes penchées sur la question de son application.


Pour ma part, je n’ai jamais eu une véritable redevabilité, et surtout un changement dans les rapports de pouvoir, entre moi et mon agresseur. Je ne me sentais pas bien de fréquenter les lieux où je pouvais le voir, je vivais de l’angoisse quand je le voyais. Je ne me voyais pas militer avec lui de nouveau dans ces circonstances. Pourtant, je le considère, malgré tout, comme un camarade de lutte. C’est justement pour ça que je crois qu’il faut trouver des façons de “régler les comptes” avec les gens qui nous agressent. Mon autre grand souci est que mon agresseur répète ces mêmes actes avec d’autres personnes, puisque l'agression qu'il a commise s'inscrit dans un continuum de comportements problématiques.En ce sens, ma dénonciation est partie intégrante de la prévention d’agression.


Description du processus de justice et de responsabilisation:


Il faut dire que dans le milieu militant dont nous faisons partie, les outils pour répondre aux violences interpersonnelles sont peu développés, voire quasi absents. Suite à la dénonciation publique dans laquelle nous sommes actuellement impliquées, il a fallu se familiariser avec les outils qui avaient été développés ailleurs (dans certaines communautés6). Étant donné qu’il s’agit de démarches qui sont développées sur des bases autonomes et horizontales, il n’y a pas d’outils tout faits ou parfaitement adaptés à la situation dans laquelle nous sommes. Cela peut expliquer en partie que le processus de justice transformatrice ait été un peu long à mettre sur pied. La structure et le déroulement du processus peuvent changer, et ont changé, selon le contexte. Il ne suit pas d’étapes linéaires. Il s’agit beaucoup d’aller-retour, de blocage et de recherche de solutions.


Nous avons procédé en petit groupuscule de soutien autour de la survivante. Afin de rassembler des informations sur un fonctionnement possible, nous avons rencontré des militantes ayant des expériences de lutte contre les agressions sexuelles et/ou de processus de justice alternative.


Nous avons aussi découvert une large littérature, principalement anglophone traitant de ces sujets. Nous avons choisi de mettre sur pied un processus de justice transformatrice qui vise à la fois réparation et justice pour la survivante, tout en ayant pour objectif de s'attaquer aux racines même de l'agression. Ce processus vise à mettre fin à la culture du viol et du silence, pour ce faire il implique une redevabilité de la part de l’agresseur, ainsi qu’une transformation et une responsabilisation du milieu de vie et de militance. Nous sommes conscientes que ce projet est un défi de taille.


La survivante a d’abord identifié des principes non négociables qui allaient encadrer le processus. Elle, avec d’autres personnes du comité, ont aussi énoncé les objectifs poursuivis par le processus. Cette étape cruciale vise à trouver des conditions à suivre pour la survivante, l’agresseur et le milieu qu’ils et elles partagent.


Dans la réalisation du processus, il faut à la fois assurer un soutien à la survivante et établir une chaîne de communication constante entre l’agresseur et la survivante. Nous avons décidé d’établir trois rôles formels pour la suite du processus.


Il y a d’abord le rôle des personnes qui sont en soutien psychologique et émotionnel, à la survivante et à l’agresseur. Ces personnes ne sont pas les mêmes pour elle et pour lui. Il peut s’agir des proches qui sont disponibles pour les soutenir et les accueillir, d’intervenant-e-s ou de professionnel-le-s, selon les besoins.


Il y a ensuite le rôle des personnes qui sont responsables de réfléchir, d’élaborer et d’assurer le déroulement du processus de justice transformatrice. La survivante participe présentement à ce groupe et souhaite conserver un droit de veto sur les décisions qui sont prises. C’est-à-dire que chacune des actions émanant du comité n’est pas nécessairement évaluée et approuvée à la pièce, ce qui pourrait être épuisant. Puisque le processus vise aussi à redonner du pouvoir à la survivante suite à l’agression qu’elle a vécue, elle conserve le droit de signifier s’il prend une tangente qu’elle désapprouve. Les tâches sont divisées à l’intérieur de ce groupe. Par exemple, des personnes sont responsables des communications avec le public via l’adresse courriel, et les publications dans les journaux étudiants, etc. D’autres sont chargées d’assurer un lien avec l’agresseur ou d’assurer un relai d’information auprès de son milieu immédiat. Des personnes sont chargées de rédiger des textes, comme celui-ci, pour rendre le processus le plus public et transparent possible.


Un dernier groupe est composé des personnes qui sont proches de l’agresseur, et qui sont engagées par rapport aux principes du processus de justice et participent activement à la responsabilisation de la communauté. C’est bien sûr le cercle le plus délicat à composer. C’est bien sur le cercle le plus délicat à composer, il est préférable que les personnes de ce groupe s’y engagent de manière durable. Cette étape est en cour.


Il y a nécessairement un chevauchement des rôles pour assurer une communication et une cohésion du processus, mais aussi puisque les ressources en termes de temps et d’énergie sont limitées. Cela étant dit, il est nécessaire que les personnes n’essaient pas de tout faire non plus. Au sujet d’une agression, les intérêts et les rôles différents des personnes affectées doivent être respectés, et compris comme des forces, tant qu’ils ne sont pas utilisés pour déligimiter la parole de la survivante et pour miner la lutte pour la justice.


Les principes


Les principes du processus ne sont pas négociables, c’est-à-dire qu’ils sont reconnus comme étant le cadre minimal et nécessaire dans lequel le processus peut avoir lieu de manière à pouvoir rendre justice à la survivante et modifier ce qui est identifié comme permettant la perpétuation de violences sexuelles et interpersonnelles dans nos milieux de militance et de vie.


1) Le premier principe est la reconnaissance qu'il y a eu une agression, sans remise en question de l'agression ou des détails de celle-ci. Il n'y a pas deux versions de l'agression qui seraient à comparer, il n'y a pas d'espace pour la version de l'agresseur dans ce processus de justice. Nous expliciterons plus tard ce dernier énoncé. Puisque le processus de justice transformatrice se veut une alternative à la justice légale, il ne s’agit pas d’un espace où seront exposées différentes versions de l’agression devant une personne ou un groupe de personnes qui pourront juger de la version qui est la plus plausible. Il s’agit d’un lieu où celle qui dit avoir été agressée est entendue. Le postulat de départ est que son consentement n’a pas été respecté, qu’il a été brisé par la personne dénoncée. Seule la survivante peut identifier que son consentement a été brisé 7et c’est elle qui connaît le mieux les impacts que cela a eus sur sa vie. Les besoins de la survivante vis-à-vis le processus de justice et de guérison doivent être entendus. Le processus vise à réparer la peine qui a été faite, à rendre justice et à transformer nos milieux sans jamais que ne soit utilisées les instances étatiques comme les tribunaux, la police ou la prison.


2) Le deuxième de ces principes est la reconnaissance du patriarcat, de la culture du viol et du silence ainsi que des conditions structurelles et les rapports sociaux de sexe, de race et de classe dans lesquelles sont insérées les personnes. À travers ces rapports sociaux, le corps des femmes subit un contrôle relié à la culture du viol et du silence. En conséquence des structures patriarcales, nous devons reconnaître que les actrices et acteurs ne sont pas égales-aux dans leurs conditions matérielles d'existence et dans la société.. En ce sens le processus de justice transformatrice n'est pas un espace neutre. Cela implique aussi de reconnaitre que dans nos sociétés, la parole des femmes est constamment bafouée, coupée, remise en question et même tue. Dans une perspective d’empowerment, la parole de la survivante sera priorisée dans le processus. Par exemple, toute communication publique doit être approuvée par la survivante.


3) Le troisième principe vise à reconnaître qu'il y a fréquemment partage et exclusion des espaces entre les personnes dans diverses situations et que la formalisation de ce partage permet de révéler et de questionner que ce sont principalement les femmes qui sont socialisées pour s'auto-exclure de certains milieux, que ce soit suite à une séparation amoureuse ou à une agression sexuelle, par exemple.


4) Le quatrième principe du processus de justice transformatrice est d’éviter, dans la mesure du possible, de nommer la survivante par son nom afin de protéger son anonymat et donc sa sécurité et sa vie privée.


5) Enfin, il est important de mentionner que le processus se dissocie de la justice légale et ce faisant le comité maintient une politique de non-collaboration avec la police, et les médias de masses, et de non-participation aux tribunaux.


Les objectifs


Le processus de justice transformatrice a plusieurs objectifs qui ont été identifiés par la survivante et le comité.


- D’abord, il s’agit de se donner les moyens de pouvoir militer ensemble à nouveau et de pouvoir partager des espaces dans le milieu de la gauche radicale montréalaise. Pour ce faire, il nous semble essentiel de rétablir les liens de confiance qui ont été brisés par l'agression. Le comité ne vise pas à émettre un jugement moral sur qui que ce soit. Ce processus est stratégique, pragmatique et politique.


- La justice transformatrice sert aussi de processus de guérison pour celle qui a vécu l’agression et pour le milieu dont elle fait partie. Cette dernière vit aussi des conséquences de l’agression, que les individus qui le composent le sachent ou non. Même si une dénonciation n’est pas faite (en privé ou publiquement), une agression entraîne des répercussions sur l’ensemble de la collectivité.


- Ensuite, le processus a pour but de maintenir et renforcer un rapport de force féministe contre la culture du viol et du silence. Cette lutte est en lien avec les luttes des classes.


- En ce sens, le processus travaille à éliminer la menace de violence par les camarades hommes cisgenres sur les femmes et les autres individus sans recourir à la police et aux tribunaux.


- Le processus de justice transformatrice en est donc un de réappropriation de nos corps, de nos espaces et de la justice, et vise plus largement à briser le contrôle social sur les femmes, racine de leur exploitation.


Démarches entreprises auprès de l’agresseur:


Pour pouvoir changer nos comportements interpersonnels et collectifs, il faut qu’il y ait des conséquences sociales et politiques dans nos milieux lorsqu’il y a perpétuation de violences racistes et de violences sexuelles, par exemple. Les humains sont capables d’atrocités, d’erreurs et d’actes violents. Ces violences, qui se manifestent dans les rapports interpersonnels, sont articulées à travers des schèmes d’oppressions structurelles. S’il n’existe aucune conséquence pour les hommes qui commettent des agressions, pourquoi est-ce qu’ils arrêteraient? Une des croyances fondamentales de la justice transformatrice est la possibilité de changement des comportements d'agressions de manière durable. Tant au niveau individuel (agresseurs) que collectif (communautés/milieux) qu'au niveau structurel. Une possibilité qui repose sur la capacité à combattre le patriarcat et la culture du viol, qui sous-tendent les agressions présentes dans nos communautés. S’engager dans un tel processus nécessite le postulat de base que tou-tes les individus impliqué-e-s dans la situation sont des êtres humains, et non des monstres dans leur nature profonde, puisque si tel était le cas, il serait vain de croire qu’ils pourraient modifier leur comportement.


Dans les jours qui ont suivi la dénonciation publique en novembre, il a été demandé à X de ne plus entrer en contact directement avec celle qu’il a agressée. Puis une personne proche de l’agresseur à signifié à une membre du comité de l’agresseur souhaitait participer à un processus de justice transformatrice.


X avait entrepris de rédiger une lettre en décembre dont nous ignorons le contenu exact, mais qui prévoyait notamment aborder directement l’agression selon la perspective de l’agresseur. Il y a eu une prise de contact par personne interposé pour demander lui explicitement de ne pas aller de l’avant avec sa publication.8


Au début du mois de janvier ont été mis sur pied une adresse courriel et un numéro de téléphone qui invitait toute personne ayant des questions sur le processus à entrer en contact avec le comité de justice transformatrice. Nous reconnaissons qu’il s’agit malheureusement d’un délai relativement long.


Dès les premiers jours de janvier, nous avons organisé une rencontre avec une amie de l’agresseur afin de partager la construction en cours du processus, les objectifs et les conditions envisagées. Cette personne a été mandatée de lui communiquer ces informations.


X nous a contactées à la mi-janvier. Nous lui avons dit que nous allions lui répondre dans les jours suivants concernant la suite des choses et que nous pouvions répondre à ses questions concernant le processus de justice transformatrice.


Au début février, nous avons reçu un courriel venant de l’agresser dans lequel il disait envisager prendre des décisions importantes dans les jours suivants. Il laissait au comité de justice deux jours pour réagir avant de mettre à exécution ses menaces. Il menaçait de dévoiler sa version de l’agression publiquement pour se défendre ainsi que de poursuivre les personnes responsables des dénonciations publiques pour diffamation. Il espérait organiser une rencontre chapeautée par un-e avocat-e afin d’en arriver à une publication commune, visant la rétraction de ce qu’il nomme comme les accusations qui pèsent contre lui.


Suite à la réception de ces menaces, le comité justice transformatrice s’est réuni et a organisé une rencontre avec lui. Le but était de faire le point sur la mise à exécution ou non de ses menaces, et un retour sur le fonctionnement du processus de justice transformatrice. Il a été nommé à ce moment que le principal obstacle au déroulement du processus est sa non-adhésion aux principes qui guident celui-ci. Plus précisément, premièrement, il ne reconnait pas qu’il est un agresseur/son agression et, deuxièmement, il perçoit que le comité l’empêche de s’exprimer. Dans le contexte où nous nous trouvons, il se pose la question de la possibilité de la prise de parole publique des personnes dénoncées publiquement comme agresseur. Selon nous, il est envisageable que l’agresseur puisse prendre la parole, à la condition primordiale qu’il ne s’agisse en aucun cas de délégitimer la parole de la survivante concernant ce qu’elle a vécu et concernant son affirmation que son consentement n’a pas été respecté. Il peut énoncer les impacts que la dénonciation a eus sur sa vie. Il peut parler de la prise de conscience qu’il a fait des impacts de son ou ses agression-s sur les autres. À condition, bien sûr, que cette prise de parole se fasse sans remettre en question le fait qu’il y a eu agression-s. En conclusion de cette rencontre, il y a eu engagement, de part et d’autre, à ce moment à établir un contact continu avant d’entreprendre toute action publique. Il manifeste sa volonté de participer au processus de justice
transformatrice, mais il n’a toujours pas accepté les principes. Le processus de justice est donc bloqué à cette étape.


Suite envisagée des démarches publiques:


Nous prévoyons organiser une rencontre publique qui porterait sur le processus de justice en cours. Il s’agira d'un forum où il y aurait une présentation du modèle provisoire construit, de ses principes et ses objectifs. Nous y ferons aussi une mise à jour du déroulement et des étapes à venir. Cette rencontre aurait l'avantage de permettre aux gens de poser des questions et de discuter. Nous aimerions intégrer les personnes qui souhaitent s'impliquer, de près ou de loin, dans le processus en les invitant aux prochaines réunions. Pour être cohérentes avec la volonté de responsabilisation de la communauté et de transformation impliquant une lutte active à la culture du viol, nous voulons démocratiser les outils que nous utilisons.


Les membres du comité justice transformatrice


comitejusticetransformatrice@gmail.com

514-987-3000 poste 2633


Notes:
1 Orientations gouvernementales en matière d’agression sexuelle, Gouvernement du Québec, 2001.


2 Orientations gouvernementales en matière d’agression sexuelle, Gouvernement du Québec, 2001.


3 Lesbiennes, gaies, bisexuelles, trans, queer et intersexe.


4 L’ASSÉ, L’Association pour une Solidarité Syndicale Étudiante, mieux connus lors de la grève de 2012 sous le nom de sa coalition large; la CLASSE. Il s’agit de l’organisation à l’origine du mouvement de grève de 2012. Nous sommes y avons été et sommes toujours des membres actives.


5 Ici le mot limite réfère à une limite imposée par les normes sociales, par la menace de violence, par la socialisation et par le patriarcat. La limite n’est pas une limite explicite imposée par une personne sur une autre, mais plutôt une convention sociale qui dicte aux femmes où, quand et comment elles peuvent dénoncer les violences qu’elles vivent.


6 Principalement dans des communautés de personnes de couleur, et des communautés autochtones.



7 Par bris de consentement, nous comprenons que la personne qui prend l'initiative dans un acte sexuel n'a as fait tout ce qui était en son pouvoir pour s'assurer du consentement de l'autre personne en lien avec ses actes (selon la définition du consentement présenté plus tôt en ce texte).


8 Nous considérions qu’il s’agissait d’une initiative semblable à la publication d’un texte de 21 pages faite par Jean- Sébastien Crépeau, qui a été dénoncé publiquement comme un agresseur sexuel. Il y relatait des détails de la vie privée de la survivante, de sa relation avec elle et où il exposait certaines agressions qu'il a commises selon sa perspective. Nous cherchions à éviter que cette situation ne se reproduise de nouveau et nous sommes en solidarité avec la survivante de Jean-Sébastien. Nous tenons à la soutenir dans toutes démarches qu’elle a entreprises ou pourrait souhaiter entreprendre pour obtenir justice et réparation.