Salut!
Je
vous transmets la réflexion à laquelle je suis parvenue en travaillant
sur le Plan de financement des universités. Elle fait écho au dernier
billet de Simon Tremblay-Pépin vu nos conclusions similaires, mais nous
ne passons pas par le même chemin et il me semble que les chiffres que
j'avance ici sont plus simples et moins hypothétiques. Je l'ai
d'ailleurs contacté afin de savoir si des raisons méthodologiques qui
m'échappent l'avait poussé à ne pas utiliser ces chiffres et au vu de sa
pemière réponse, il ne semble pas que ce soit le cas, mais j'attends
plus de détails.
En fait, selon les chiffres présentés
par le gouvernement dans le Plan de financement des universités,
la hausse des frais de scolarité prévue pour l'automne 2012 devrait
rapporter, en 2016-2017, 332 millions de dollars supplémentaires aux
universités québécoises. De ce montant, il faut toutefois
retrancher 116 millions de dollars qui serviront à bonifier l'aide financère aux
études, afin de réduire l'impact de la
hausse sur l'accessibilité. Déjà, cette dernière ne rapporte donc
que 216 millions1.
Mais il faut également ajouter, à ces premières déductions,
l'augmentation des sommes que devra verser le gouvernement en crédits
d'impôt pour frais de scolarité. De fait, selon le Plan de
financement, ce sont 67, 9 millions de dollars supplémentaires
qui seront redonnés, à terme, aux étudiants et étudiantes et à
leurs parents. Autrement dit, selon les dispositions actuelles du
Plan de financement, sur les 332 millions supplémentaires
qu'il en coûtera aux universitaires, seuls 150 millions de dollars
iront aux universités, soit déjà moins de la moitié de l'effort exigé.
Ce qui nous intéresse plus particulièrement
en ce moment, c’est
que toute bonification à l’AFÉ ne fait donc qu’amplifier la
contradiction et réduire
les revenus qui seront tirés de la hausse. Au-delà de l'offre bidon que la ministre a
sorti la semaine dernière, on
peut donc déjà contre-attaquer en disant que dans son refus de revenir sur sa décision, le
gouvernement se place lui-même dans une impasse. En augmentant les bonifications à
l'AFÉ, il ne fait que démontrer avec plus de clarté que l'objectif véritable de la
hausse n'est pas tant d'augmenter les revenus des universités, mais de déplacer la
source de leur financement. À l'inverse, maintenir la hausse sans améliorer de façon
substantielle l'aide financière aux études, voire chercher à abolir une des mesures
compensatrices pour en financer une autre comme le propose la CAQ, aura des conséquences
importantes pour l'accessibilité aux études. En somme, maintenir la hausse est une
position sans issue. On a ainsi beau jeu de dire que la hausse des frais de scolarité nuit
à l'accessibilité tout en rapportant des fonds bien limités aux universités, et de
rappeler nos alternatives fiscales.
J'espère que cela puisse vous être utile. J'ai
mis juste en-dessous quelques précisions sur les chiffres avancés afin
que vous puissiez juger de l'utilisation qui peut être faite d'une telle
démonstration. J'écris ce courriel un peu vite alors n'hésitez pas si vous avez
des questions, des
commentaires ou si certains éléments ne sont pas clairs.
MP
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*216 millions de revenus après soustraction des bonifications à l’AFÉ:
Le chiffre diffère de la promesse de 265 millions que répète le
gouvernement. Dans ses calculs, le gouvernement ajoute aux revenus 49
millions en 2016-2017 liés à la « variation des clientèles ». Vous me
corrigerez si je me trompe, mais ma réflexion était la suivante: si les
effectifs des universités sont plus nombreux, ce sont non seulement les
revenus des universités qui augmentent, mais également leurs dépenses :
il ne s’agit donc pas à proprement parler d’un investissement
supplémentaire. On me répondra sans doute que la population étudiante
augmentera de toute façon et donc, qu’à tout le moins, la hausse
permettra d’augmenter les revenus tirés de ces étudiant-e-s aussi. Le
problème, c’est que le Plan de financement affirme qu’il y aura une
hausse des effectifs étudiants (et même une hausse de la proportion
d’étudiants et d’étudiantes universitaires par rapport à la population
de 18-24 ans d’ici 2016-2017) sans expliquer ce qui permet de justifier
de telles prévisions. En d’autres termes, il me semble qu’on peut
laisser ce chiffre de côté tant que la ministre ne fournit pas davantage
d’explications.
*67,9 millions supplémentaires en crédits d’impôts:
c’est un peu étrange dans le Plan de financement. Le gouvernement
insiste sur le fait, qu’à terme, c’est près de 70 millions qui seront
remis aux familles en crédits d’impôt pour frais de scolarité. Mais dans
un tableau juste en-dessous, on précise qu’en 2016-2017, le coût du
crédit sera de 43 millions et, qu’« à terme » (ce qui renverrait, je
suppose, à 2017-2018), ce sera 67,9 millions. La différence de 25
millions en un an n’y est pas justifiée. Il y a donc une certaine
confusion, mais je pense qu’on peut utiliser le 67,9 millions dans la
mesure où c’est le chiffre sur lequel le gouvernement lui-même insiste.
D’autre part, je sais que cette somme n’est pas prise du plan de
financement, elle n’est donc pas directement déduite des revenus de la
hausse. Mais il s’agit à mon sens d’une fausse distinction dans la
mesure où le gouvernement prétend que c’est pour alléger son propre
effort dans le financement des universités qu’il doit solliciter les
étudiants et étudiantes. En ce sens, toute dépense supplémentaire pour
le gouvernement entraînée par la hausse, doit être comptabilisée comme
une partie de la contradiction entre la justification donnée et la
capacité réelle de la hausse de financer les universités.