J'appuie.
Même si l'argent, même si les besoins, nos principes fondamentaux demeurent
primordiaux.
Matisse Makwanda
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Date: Sun, 17 Jun 2012 15:26:46 +0000
Subject: [Comité Mob] Au sujet du financement de la CLASSE par le show de la CHI
Voici un texte écrit par plusieurs féministes du comité-Femmes ggi de Montréal au sujet du
show de la CHI de lundi:
Le show de la CHI: Y’a personne comme un humoriste pour savoir que la farce a assez
durée
Y’a personne comme la CLASSE pour marchander sa position féministe !
:La
CHI (Coalition des Humoristes Indignés) présente un spectacle d’humour
(sic), dont 50% des profits seront versés à la CLASSE (Coalition Large
de l’Association pour une Solidarité Syndicale Étudiante) pour la
défense des arrêté-es.
“L'ensemble
des profits seront versés à Juripop, qui défend la FECQ, la FEUQ et la
TaCEQ pour l'invalidation loi 78. En vertu d'un mandat de congrès, nous
collaborons avec Juripop pour les affaires légales. Par contre, puisque
nous avons nos propres avocats, nous avons signé une entente avec
Juripop comme quoi 50% des profits amassés vont revenir à la CLASSE.#”
Les
bravos fusent de partout : c’est un pied-de-nez à Gilbert Rozon,
puisque le spectacle est chapeauté par ses sœurs, qui affirment ne pas
partager les visions réactionnaires de ce dernier sur le conflit
étudiant. Enfin de l’humour engagé au Québec. La culture et la lutte
sociale, après s’être courtisées sous la forme de carrés rouges
fièrement arborés par nos artistes québécois, se sont finalement
embrassées, scellant leur union idyllique pour le meilleur et pour le
pire. La CLASSE annonce l’événement sur son site, puisqu’il y a
convergence dans les intérêts. Les féministes se doivent cependant de
mettre un frein à ce mielleux enthousiasme.
Parce que nous sommes féministes.Parce que la CLASSE se dit féministe et se doit
d’appliquer les positions et revendications qui vont dans ce sens. Parce que la
carrière de certains des participant-es du spectacle de la CHI
(Coalition des Humoristes Indignés) est fondée sur un bassin de jokes
sexistes, homophobes, racistes ou coroborant des formes d’oppressions. Nous dénonçons le
laxisme du féminisme de la CLASSE, qui accepte de promouvoir le
spectacle de la CHI (Coalition des Humoristes Indignés) et en récolte
une partie de l’argent des profits.
Qui
affirme défendre la cause étudiante est forcément un allié, n’est-ce
pas? Un rapide coup d’œil à la liste des humoristes indignés suffit par
contre à procurer une insoutenable nausée. Il est si facile d’oublier
que la carrière de ces pseudo-indignés s’est érigée à coups de blagues
sexites, racistes, homophones, bref en réitérant les rapports de
domination sous prétexte que “c’est juste une joke”. Il semble en effet
que les militant-es de la CLASSE s’enthousiasmant à l’idée de cet
événement aient la mémoire courte.
Parce
que la carrière de certains des participant-es du spectacles de la CHI
(Coalition des Humoristes Indignés) est fondée sur un bassin de jokes
sexistes, homophobes, racistes ou coroborant des formes d’oppressions.
Nous
ne mettons pas tous les humoristes dans le même panier. Nous nous
penchons sur les cas que nous jugeons les plus problématiques. Ce sur
quoi nous désirons insister est la banalisation du sexisme dans le monde
de l’humour. Nous tenons aussi à souligner la sous-représentation des
femmes dans le line-up, tout comme celui des personnes de couleur. Bref, feke c’est
l’histoire d’un gars blanc hétéro qui faisait des jokes plates sur tous ceux qui étaient
pas comme lui...
François
Massicotte a animé à TQS pendant quatre ans, de 2001 à 2004, une
émission de télévision humoristique (sic) gracieusement intitulée Testostérone.
Sous le couvert de faire de l’humour (sic), ce ramassis de conneries
rameutait quotidiennement les pires clichés sexuels et hétéronormatifs.
Mike Ward, un des humoristes les plus sexistes du Québec (l’entièreté de
son capital humoristique (sic) repose en effet sur des jokes de grosses
et de filles qui ne veulent pas avaler), était un des collaborateurs
réguliers de cette émission, et se retrouve également parmi la
programmation du spectacle bénéfice. On ne s’attend pas à ce qu’on nous
rétorque que nous ne comprenons pas le deuxième niveau de Testostérone,
que ces hommes ne sont pas réellement machos et, qu’à l’image de
Jean-François Mercier et de son personnage de « gros cave », nous
prenons pour du cash des discours qui veulent au contraire rire des
discours clichés. L’exemple de Jean-François Mercier étant effectivement
excellent, nous nous permettons de répondre en se servant de lui,
puisqu’il ne manque pas de rappeler à plusieurs égards nos amis de Testostérone, et, ô
surprise, se retrouve lui aussi dans la programmation du 18 juin.
Mercier détient aujourd’hui une émission au nouveau TQS, V, où il personnifie soir après
soir un « gros cave », qui peut donc s’en permettre et s’en permettre, puisqu’il ne fait
que jouer
le gros cave. Or, la parodie, pour qu’elle puisse être qualifiée de
telle, se doit d’être explicitement une critique de ce qu’elle dénonce.
Elle est intrinsèquement politique, en ce qu’elle expose un dissensus
entre plusieurs discours et prend position quant à celui qui a raison.
Elle est une forme particulièrement difficile à maîtriser, puisqu’elle
doit rivaliser d’ingéniosité afin de tenir un double discours : celui
qu’elle dénonce et celui qui dénonce. Pour qu’une parodie soit efficace,
la complexité textuelle doit être d’un niveau très avancé. Tous les
détails de tous les éléments de la forme doivent être choisis et par la
suite mobilisés afin de trahir les éléments du premier niveau de fond,
celui du discours à dénoncer. On parle par conséquent d’un agencement
assez savant de stratégies textuelles et de mises en scène. Singer un
comportement à outrance dans une émission à grande écoute diffusée par
un canal aux vues politiques dangereusement réactionnaires (est-il
nécessaire de rappeler que c’est V
qui offre chaque soir une tribune à Mario Dumont) ne peut en aucun cas
être un geste politique intéressant. En fait, accepter de parader sur
les ondes de V
est en soi suffisant pour retirer toute crédibilité politique à
Jean-François Mercier lorsque celui-ci se prétend « indigné ». Nous ne
pouvons également nous empêcher de mentionner son étroite collaboration
professionnelle avec Louis Morrissette, dont le glorieux trio Les Mecs comiques
battait à l’époque des records de sexisme et d’homophobie. Rappelons
que ces deux hommes, Mercier et Morrissette, participèrent également
activement à l’écriture du Bye-bye 2008, décrié pour ses nombreuses blagues (sic) au
contenu sexiste et raciste.Maxim Martin, humoriste qui se présente comme le gros tough
ayant assez de guts pour dire les vraies affaires,
a déjà dit devant une foule « si je suis coupable parce que je parle de
cul… vous êtes tous complices et coupables de ma vulgarité»#. Suivant
le principe du “Je sais que tu sais que je sais que ce que je dis” est
méprisable. Cette citation démontre plutôt que l’humour offre une
tribune de choix au sexisme. L’humour sexiste ne se moque pas du
sexisme, il le reproduit et ainsi ne contribue pas à sa disparition,
mais lui offre une voix qu’on devrait supposément tolérée sous peine
d’être accusé-es de censure. Cette citation amène aussi à réfléchir au
concept assez simple suivant : rire d’une joke sexiste, c’est être
complice du sexisme. Nous n’avons pas besoin d’alliés sexistes dont les
propos participent à la normalisation et la banalisation de la misogynie
ou tout autre forme d’oppression.
L’humour
(sic) industriel québécois et la révolte sociale sont intrinsèquement
incompatibles, puisque le premier repose sur la reproduction de tout ce
qu’il y a de plus problématique dans la société. Un humour engagé est
certes possible et hautement souhaitable, mais il ne peut certainement
pas provenir des mêmes personnes qui, depuis plusieurs années,
provoquent les rires gras en instrumentalisant les différents rapports
de domination qui sous-tendent les rapports sociaux. Ces humoristes
(sic) sont formés en un seul et même endroit, l’École de l’humour (sic),
une usine qui formate au sein de ses diplômés une idéologie du statu
quo et de la reproduction sociale irréconciliable avec toute forme
d’engagement politique.
“L’humour
a toujours été un reflet de société, la perversion, l’immoralité du
système. C’est pas les humoristes qui ont poussés la censure plus loin.
Je vais vous donné un exemple. Y a 4 ans ben des émissions de télévision
voulaient pas m’inviter parce qu’elles me trouvaient trop heavy. Là
aujourd’hui ces mêmes émissions-là m’invitent parce que je suis heavy.
Donc la vraie question n’est pas est-ce que les humoristes vont trop
loin. Mais plutôt pourquoi on peut aller aussi loin? ”# Une joke qui
reproduit le statut quo est une joke qui vend des billets. L’engagement
politique, le vrai, dénonce, certes, mais il travaille d’abord et avant
tout à faire advenir le changement social.
Parce que la CLASSE se dit féministe et se doit d’appliquer les positions et
revendications qui vont dans ce sens.
La
CLASSE se présente en tant qu’une organisation démocratique, combative
et féministe (sic), notamment en raison des revendications suivantes
sensées orienter sa pratique.
POINT À LA LIGNE.
Mais...
Tant qu’à y être, et parce plusieurs ont tendance à se souvenir moins
de ces principes que des autres, en voici quelques-uns démontrant qu’une
alliance avec des humoristes sexistes va à l’encontre de ce que devrait
être la pratique de la CLASSE:
L’ASSÉ
se positionne contre toute forme de promotion d’un idéal féminin et
masculin standardisé dont celui modelé par le marché capitaliste et
patriarcal.(Adoptée au Congrès des 3 au 5 mai 2002, modifiée au Congrès annuel des 22 et
23 avril 2006)
Considérant
que nous nous opposons à toute forme de promotion d’un idéal féminin
standardisé dont celui modelé par le marché capitaliste et patriarcal, l’ASSÉ se
positionne contre tout concept relié à la femme-objet menant entre autres a la
marchandisation du corps des femmes.(Adoptée au Congrès du 27 au 29 septembre 2002,
modifiée au Congrès annuel des 22 et 23 avril 2006)
L’ASSÉ
se positionne contre toute forme de promotion d’un idéal hétérosexuel
standardisé dont celui modelé par le marché capitaliste et patriarcal.(Adoptée au Congrès
d’orientation du 25 au 28 novembre 2005)
L’ASSÉ intègre à son discours une analyse antipatriarcale et anti-sexiste.(Adoptée au
Congrès des 10, 11 et 12 février 2006)
Que l’ASSÉ se positionne contre l’homophobie. (Adoptée au Congrès des 24 au 26 avril
2009)
Dans
la mesure où la CLASSE souhaite faire honneur à ses principes
féministes, pour ne mentionner que ceux-là, elle se doit de retirer
l’annonce de cette foire de son site internet et de cesser d’échanger
son silence sur un humour douteux contre de l’argent. Sinon, elle
prouvera sans aucun doute qu’elle ne porte en elle aucun réel potentiel
de contestation sociale.
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