J’écris ce texte dans le but d’ouvrir les possibles concernant la question
de la participation de l’ASSÉ au sommet sur l’enseignement supérieur. Cette
question m’apparaît souvent présentée sous la forme de ce que je crois être
un faux dilemme : d’une part nous pourrions participer au sommet ou,
d’autre part le boycotter dans le but de le critiquer par les moyens de
pressions propres à l’ASSÉ. Ce que je propose se veut un moyen terme entre
ces deux options permettant à la fois de rester cohérent avec les principes
de l’ASSÉ et d’envisager une mobilisation future où l’ASSÉ est encore en
mesure de réunir les étudiants et les étudiantes à son projet de société.
Tout d’abord, le premier constat probant de l’analyse des précédentes
rencontres préparatoires est qu’il est impossible que les conclusions du
sommet soient compatibles avec nos positions. Les déclarations du ministre
Duchesne sont d’ailleurs venues confirmer ce constat (
http://www.radio-canada.ca/regions/quebec/2013/01/28/002-duchesne-sommet-en…).
Le deuxième constat est que le sommet lui même ne représente pas ce que
nous considérons comme un réel « débat de société » sur l’éducation. D’un
côté, les problèmes structurels du sommet (brièveté des interventions,
courts intervalles entre les rencontres, forte présence du milieu patronal
etc.) empêchent tout débat de fond sur les sujets abordés, et d’un autre
côté, la position gouvernementale est fortement mise de l’avant alors
qu’aucun des intervenants ne soutienne cette position.
La preuve n’est donc plus à faire : les conclusions du sommet ne seront que
des semblants de consensus. Or, le sommet lui-même demeure une tribune où
les délégués de l’ASSÉ peuvent dénoncer et critiquer les positions des
intervenants et la structure du sommet. Cette possibilité, jumelée à celle
de journées de grèves et de manifestations lors du sommet, ne pourrait que
dynamiser notre rapport de force par rapport au gouvernement. Mon point est
donc que l’ASSÉ n’aurait rien à perdre et tout à gagner si elle est en
mesure de critiquer à la fois de l’intérieur et de l’extérieur cette
supercherie qu’est le sommet sur l’éducation.
On pourrait toutefois penser que notre participation au sommet aurait pour
effet d’en légitimer les conclusions et de trahir les principes du
syndicalisme de combat. Mais je crois que cela est faux considérant que le
précédent gouvernement n’a pas eu de difficulté à légitimer un consensus
sans la participation de l’ASSÉ en 2010. En outre, si l’ASSÉ participe au
sommet pour en critiquer la structure, il en est d’autant plus clair
qu’elle refuse toute légitimité aux conclusions du sommet. Finalement, le
fait de participer au sommet n’empêche pas qu’il demeure vrai que la
gratuité scolaire ne pourra être gagnée que par la présence d’un mouvement
social fort. Le syndicalisme de combat n’a jamais empêcher l’ASSÉ de
participer à des instances gouvernementales telles que des commissions
parlementaires et des négociations tout en y critiquant la structure.
Ma conclusion est donc qu’une autre possibilité existe entre le retrait ou
la participation, c’est-à-dire la réalisation de ces deux possibilités à la
fois qui aurait pour effet de dynamiser le débat et la mobilisation.
Guillaume Bertrand
Président de l'ADÉPUM