Bon matin tout le monde,
J'écris ces lignes alors que le projet de loi 78 n'est pas encore adopté. Je ne
sais donc pas si des modifications vont être adopté, mais j'ai au moins ici la chance
de m'exprimer franchement sur le sujet sans avoir peur que ce courriel ne puisse
m'incriminer.
Je voulais partager avec vous mes impressions face à cette immonde loi spéciale, ainsi
qu'une proposition de plan d'action à court terme en fonction de la conjoncture.
Tout d'abord il me semble que cette loi spéciale comporte trois composantes majeures
:- La fin du droit de grève étudiante (jusqu'en juillet 2013)- L'interdiction de
faire des manifestations sans collaborer avec les forces de l'ordre (jusqu'en
juillet 2013)- Le repport des trismestre d'hiver en août
Si cette loi n'aurait inclu que des mesures sur le droit de grève et le repport du
trimestre, il m'aurait semblé judicieux d'attendre avant de la défier. Nous
aurions alors gagné à ne pas trop mouiller nos organisations, parler de "poursuite de
la grève" sans faire directement référence aux blocages. Et puis conserver nos
ressources pour le mois d'août, et alors désobéir massivement à la loi. Toutefois, un
facteur majeur entre en ligne de compte : la section de la loi sur les manifestations.
Les dispositions de la loi qui encadrent les manifestations briment purement et simplement
la charte des droits et liberté sur la liberté d'expression/de manifestation. Elles
sont scandaleuses et elles s'appliquent à tout les citoyen-ne-s, pas seulement aux
étudiant-e-s. En ce sens, il nous est possible de recueillir un large appui populaire en
contestant cette loi en insistant spécifiquement sur cet aspect.
Pour ce faire, la riposte doit être rapide et elle doit profiter du momentum actuel, avant
que les étudiant-e-s partent et occupent leurs emplois d'été.
Nous devons contester l'existence même de cette loi. Ajouter clairement dans nos
revendications sont retrait pur et simple et l'amnistie pour toute personne arrêté en
vertu de celle-ci.
Et pour contester cette loi, notre meilleure arme est de provoquer une désobéissance
massive à celle. En ce sens, la manifestation du 22 mai est tout indiquée. Il est
difficile de prévoir exactement combien de personnes sont prêtes à défier cette loi et à
se faire arrêter, mais nous pourrions annoncer clairement nos couleur en disant : Nous ne
donnerons pas le trajet de la manifestation, elle contreviendra donc à la loi spéciale.
Nous invitons les étudiant-e-s et la population québécoise à défier la loi spéciale. Nous
invitons tout le monde à rester dans la manifestation jusqu'à ce que les policiers
nous aient arrêtés, tous et toutes, un à un.
L'idée, est de parvenir à convaincre plusieurs millier de personne de défier la loi
spéciale et de se laisser arrêter si la police intervient (au lieu de fuir). En provoquant
l'arrestation de quelques milliers de personnes, nous pourrons :
- Provoquer une indignation massive chez la population et faire payer très cher au
gouvernement son move- Attirer le regard des autorités internationales - une arrestation
de cette ampleur ne passera pas inaperçu- Faire disparaitre la peur de l'arrestation
chez les étudiant-e-s. Chaque personne arrêté aura moins peur de défier une nouvelle fois
la loi en août.- Commencer le processus de contestation judiciaire en inconstitutionalité
de la loi dès les premiers procès.
Pour arriver à cela, une étape préliminaire serait de faire un grand point presse dimanche
soir au congrès de la CLASSE où l'on appelerait les étudiant-e-s à manifestation le 22
mai et à défier la loi spéciale. Cela impliquerait probablement l'arrestation de
l'équipe nationale et des délégations présentes. Cela pourrait également faire fermer
la CLASSE et, selon les interprétations, retomber sur les associations locales des
délégations impliquées. Les conséquences pourraient être dramatique à première vue, mais
la force symbolique de telles arrestations aurait la capacité de provoquer une vague
d'indignation qui stimulerait la participation à la manfiestation du 22 mai.
Si le gouvernement s'attaque à des organisations politiques qui le contestent,
emprisonne ses exécutifs , et puis des milliers de personnes pour la seule raison que le
trajet d'une manifestation n'était pas communiqué aux forces policières, alors il
s'exposera à de très sévères critiques de toutes les sphères de la société. La
pression interne pourraient être assez forte pour le faire reculer a posteriori.
Et à ceux et celles qui ont peur des conséquences des amendes sur nos vies et sur la
pérénité de nos organisations, je dirais : Nous ne sommes plus dans une lutte contre la
hausse des frais de scolarité. Nous n'avons plus une revendication particulière à
satisfaire. Nous n'avons plus à cadrer notre activité dans les paramètres du
syndicalisme qui cherche à obtenir une concession de l'État. Notre lutte s'inscrit
dans un contexte global, et comme cela se passe ailleur dans le monde, notre élite locale
a essayé et essaie toujours de cassé le mouvement. Ce que nous devons faire, c'est
pousser cette logique mondiale dans ses contradictions. Nous devons forcé l'État à
appliquer ces sanctions pour en démontrer l'absurdité. Nous devons faire payé très
cher au gouvernement ce genre de comportement, car sans cela, ce n'est pas seulement
le combat contre la hausse des frais de scolarité que nous aurons perdu, mais bien la
possibilité de mené une quelquonque lutte réellement combative au Québec. Si nous ne
défions pas ouvertement cette loi, c'est l'élite pro-néolibérale qui remporte une
autre éclatante victoire sur les mouvements sociaux. Ce serait la preuve que les
populations sont suffisament dociles pour perde leur droit de manifester sans rien dire.
Rendu où nous en sommes, quelques jours de prisons et la faillite de plusieurs
associations sont des conséquences marginales par rapport à la perte collective que le
Québec subirait à plier devant une telle loi.
Voilà qui conclu mes réflexions préliminaires.
Solidairement,- Alain Savard
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