Bonjour a tous
et a toutes,
Je viens de decouvrir un petit article interessant. C est sur un site
qui permet d avoir acces a toutes les premieres pages du devoir
depuis sa fondation.
http://www.histoire-quebec.org/missions/recherche/resultat.asp?id=602
C un article de Andre Laurendeau qui analyse, en 1960, le fait que le
Parti Liberal vient d inclure dans son programe de Parti rien de
moins que la gratuité scolaire!
bonne lecture!
Alex d histoire
POUR LA GRATUITÉ SCOLAIRE
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André LAURENDEAU, 13 mai 1960, Le Devoir, p. 4
C’est la première fois, croyons-nous, que le principe de la gratuité
scolaire est inscrit dans le programme d’un des partis traditionnels
du Québec. Et les libéraux l’ont posé sans la moindre ambiguïté.
Article 2. – Gratuité scolaire à tous les niveaux de l’enseignement,
y compris celui de l’université.
Gratuité, également, des manuels scolaires de l’enseignement public.
Parlera-t-on de démagogie? Il faut, au contraire, un certain courage
pour heurter de front des préjugés en voie de disparition, mais
encore virulents dans certains secteurs de la province: cela devient
plus évident quand on passe à l’article 4 du programme libéral, qui
porte jusqu’à l’âge de 16 ans l’obligation de la scolarité.
Ceux qui réclament depuis des années, la gra! tuité scolaire à tous
les niveaux — ou des mesures équivalentes — n’auront donc pas
travaillé en vain. Ils n’ont pas encore gain de cause, mais la
question est enfin portée devant l’ensemble de l’opinion: un grand
parti identifie son sort à la mesure.
Et pourquoi? Le programme l’explique dans un commentaire dont tout
serait à citer. Nous avons dans le Québec «la plus faible»
fréquentation scolaire du Canada; la moitié des adolescents quittent
l’école à quinze ans, — quand ce n’est pas plus tôt: cela accentue,
pour la jeune génération, les «chances de chômages». Il y a à
l’université peu de fils de cultivateurs et d’ouvriers. Or, au cours
de la dernière session, on a oublié le sort des étudiants eux-mêmes
et des parents qui ont la charge de l’éducation.
Nous avons souligné tout ce qui fut accompli durant cette session.
Mais il est vrai qu’on n’a pas abordé directement le problème de
l’étudiant. Il faut le faire sans retard, disent les libéraux, et
parvenir à ce que! tous les jeunes qui en ont le talent et la volonté
(puissent), sans payer de frais de scolarité, bénéficier de
l’éducation à tous les niveaux…
L’engagement est formel, sans retraite possible. Il y a lieu d’en
féliciter les rédacteurs du programme, et l’état-major qui l’a
adopté.
***
Par ailleurs, les libéraux ne définissent pas les modalités de
l’opération. C’est sage de leur part: des articles détaillés eussent
été prématurés: ils auraient d’ailleurs distrait l’opinion, en
permettant à l’adversaire de sauter sur tel ou tel aspect pratique.
Nous en sommes au stade où c’est le principe qui doit être discuté.
D’un autre côté, cela signifie qu’un accord sur le principe
n’entraînera pas nécessairement une approbation des mesures concrètes
que les libéraux feront voter — s’ils sont élus et s’ils restent
fidèles à leur programme.
Quel serait le coût de l’opération? Sans doute moindre qu’on ne
l’imagine: on aurait tort de croire qu’une fois le régime! établi,
les masses vont envahir tous les niveaux de l’enseignement.
Il ne s’agit d’abord que des enfants «qui ont le talent» nécessaire,
et cela limite par hypothèse le nombre des candidats au niveau moyen
et supérieur. Il s’agit aussi des jeunes qui ont la volonté
d’étudier: et ce terme un peu vague de «volonté» recouvre toute une
série de phénomènes dont nous avons souvent parlé. Comment les
enfants des classes économiquement faibles sont-ils conditionnés
devant le problème de leur propre éducation? Car le défaut d’argent
n’est pas, loin de là, le seul obstacle: les masses ne profitent pas
entièrement des possibilités qui existent déjà. La gratuité scolaire
ne fera pas de miracles.
Mais elle aura au moins supprimé l’injustice la plus odieuse. Et elle
devra s’accompagner de toute une série de mesures: orientation bien
plus poussée et plus efficace, éducation des adultes, aide positive
aux étudiants, etc.
On ne saurait l’établir du jour au lendemain sans ris! quer des
catastrophes. Rendre l’école plus aisément accessible, cela ne doit
pas s’entendre autrement que sur le plan financier: car les barèmes
intellectuels et moraux doivent demeurer aussi exigeants. À quoi
servirait-il d’ouvrir l’université à des milliers d’étudiants
nouveaux si la qualité de l’enseignement devait s’effondrer? La
nécessité de préparer un corps professoral assez nombreux et
compétent posera d’ailleurs des problèmes aigus: on sait à quel point
ils existent déjà, et combien ils sont de moins en moins résolus. Il
faudra les reprendre presque dans leur totalité.
***
Ces réflexions s’imposent, il nous semble, à quiconque réfléchit.
Elles ne sont pas des réserves sur le fond de la question: nous
croyons depuis longtemps que la gratuité scolaire s’impose, qu’elle
soit réalisée d’une façon ou d’une autre. Elle s’impose très
particulièrement dans un milieu comme le nôtre, relativement pauvre
en argent et riche en hommes.
Nous devons prendre les moy! ens qu’il faut pour utiliser tous les
talents. Nous devons supprimer les causes d’amertume sociale. Nous
devons annuler, dans la mesure où c’est possible, la loi qui
prédestine au collège et à l’université à peu près seulement les
garçons et les filles dont les parents jouissent d’une certaine
aisance.
Le parti libéral a eu raison d’inscrire dans son programme le
principe de la gratuité scolaire.
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